Page:Sand - Monsieur Sylvestre.djvu/310

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— Oui, aidez-moi ; mon cheval m’a emportée et jetée à terre.

C’était la voix de Jeanne.

— Êtes-vous blessée ?

— Non… Je ne sais pas, je suis étourdie, j’ai été effrayée… Aidez-moi à rejoindre madame Duport et M. Nunez, qui doivent être bien inquiets de moi.

— Pouvez-vous marcher ?

— Je ne sais pas, j’essayerai.

— Et où sont-ils ?

— Ils doivent être fort près d’ici, ils couraient après moi.

Je prêtai l’oreille ; rien ne troublait le silence de la nuit, sinon le clapotement d’une source voisine et le chant d’une rainette. Il était bien étonnant que les compagnons de promenade de mademoiselle Jeanne se fussent laissé devancer à ce point en la voyant en danger. Je lui demandai s’ils étaient montés sur des ânes ; je me rappelais ce que Gédéon avait dit à mon oncle du projet d’une rencontre imprévue, d’une surprise romanesque. Jeanne s’était levée, je ne pouvais voir si c’était avec effort. Sans la prévenir, j’enflammai vivement une allumette et je la regardai attentivement pendant la demi-minute que dura ce faible luminaire. Elle me sembla très-pale, mais elle ne paraissait avoir aucun mal ; sa robe ne portait aucune trace de chute ; sa chevelure n’était pas dérangée sous son petit chapeau, dont le voile n’était pas déchiré et dont l’aigrette de plume n’était pas brisée ; sa cravache ne s’était pas échappée de sa main.

— Mademoiselle Jeanne, lui dis-je, lorsque l’allumette fut finie, vous n’êtes pas tombée, et ceux qui vous accompagnaient ne sont pas inquiets de vous ;