cela que je me suis prêtée à leur fantaisie : j’ai cru deviner que M. Nuñez était affreusement jaloux de vous et qu’il voulait me compromettre pour vous engager avec moi. Je me suis dit : « Il est temps de voir clair dans une intrigue où je sers de jouet à ceux qui se disent mes meilleurs amis. Je verrai M. Sorède, je lui parlerai sans qu’on ose m’interrompre, je lui demanderai une franchise entière. » Parlez donc ; aimez-vous mademoiselle Vallier ?
— Je n’ai pas à répondre à une question que je ne vous ai pas donné le droit de me faire.
— Vous craignez d’être entendu ?
— Non, dis-je en élevant la voix ; je n’ai pas de secret pour Gédéon Nuñez !
— Mais pour madame Duport ?
— Gédéon peut disposer de mes confidences.
— Vous lui avez confié votre amour pour Aldine, à lui ?
— Eh bien… oui, mademoiselle !
— Alors, vous me le confiez, à moi aussi ?
— Oui, puisque vous me dites que cela est nécessaire pour faire cesser un quiproquo ridicule.
— Aldine sait que vous l’aimez ?
— Non, elle ne s’en doute seulement pas.
— Vous me le jurez ?
— Sur l’honneur.
— Alors, elle ne m’a pas trompée. J’ai été injuste envers elle. Je vais lui en demander pardon.
— Vous ferez bien.
— Voulez-vous que je lui dise que vous l’aimez ?
— J’y consens de tout mon cœur !
— Ah !… Vraiment ?
Jeanne, qui s’était rassise, resta un moment sans