Page:Sand - Monsieur Sylvestre.djvu/314

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rien dire ; puis elle se leva, et, avec une énergie de sincérité dans la voix :

— Tous êtes un brave et honnête garçon ! Aldine est ma véritable amie. Elle se sacrifiait pour moi, car je suis sûre qu’elle vous aime. Eh bien, je lui dirai tout ce que nous venons de nous dire.

— On vous en empêchera.

— M’empêcher, moi, de faire ce que je veux ? J’en défie l’univers ! Oh ! j’ai une volonté, allez ! On ne me connaît pas. Je ne me connaissais pas moi-même avant ces derniers événements, qui m’ont prouvé que ma destinée dépendait de mon énergie. Elle est terrible, ma destinée ; mais je serai aussi terrible qu’elle. Ne me croyez pas mauvaise pour cela. J’ai rompu en apparence avec ma mère, mais nous nous écrivons et nous nous entendons très-bien : dès que je serai mariée, je saurai l’imposer à ma nouvelle famille et triompher de toutes les circonstances. Je connais mon pouvoir à présent ! J’ai essayé mes forces depuis quinze jours que l’on me promène dans le beau monde. J’ai été affreusement coquette, et je n’aurais qu’à choisir un mari parmi les jeunes fous à qui j’ai fait perdre la tête : mais je veux une très-grande fortune et un homme raisonnable. Vous voyez que je n’étais pas aussi éprise de vous qu’on a sans doute essayé de vous le faire croire.

— Je ne l’ai jamais cru.

— Quand vous l’auriez cru un peu, qu’importe ? Vous me connaissez maintenant ; je suis ambitieuse, je dois l’être. Si je ne l’étais pas, si je n’avais pas la volonté et la force de combattre le malheur de ma naissance, je serais forcée d’être courtisane ou religieuse. Je ne serai ni l’une ni l’autre. Je serai riche et