Page:Sand - Monsieur Sylvestre.djvu/52

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de m’en affecter ; j’en ai un autre qui lutte encore contre le même mal, et je ne veux pas cesser d’espérer. La perte de mes forces réagirait sur lui. Le bonheur n’est pas une chose purement personnelle, va, il y a corrélativité du dedans au dehors et du dehors au dedans. Nous reviendrons là-dessus, car là est, je crois, le mot de l’énigme. Écris-moi toujours de longues lettres, c’est ma récréation, mon soulagement quand je reviens de traîner mon boulet. Tous tes raisonnements ne feront pas que l’idée d’un bonheur dont tu serais exclu me suffise.




X

DE PIERRE À PHILIPPE


Vaubuisson, 10 mars 64.

Tu as raison, il faut causer et non discuter. Si je te lisais mon travail de chaque jour, je me griserais peut-être, et tu fais sagement de me mettre en garde contre les convictions passionnées. Je crois que les bons esprits ne doivent pas s’embarquer dans la recherche du vrai avec la volonté de faire plier toute réflexion à un but trop déterminé d’avance ; c’est se priver des clartés qui peuvent luire en chemin. Le vrai vaut bien qu’on lui sacrifie toute la provision qu’on avait faite pour courir après lui.

Causons donc, puisque cela te fait plaisir : cela me fait du bien, à moi : je ne suis plus seul quand je t’écris.