Page:Sand - Monsieur Sylvestre.djvu/78

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consiste en un vieux petit pavillon Louis XIV, entouré de deux côtés par une muraille en ruine et couverte de lierre. Cette muraille n’enferme rien et marque l’entrée d’une clairière en pente, sans contours déterminés. Quelques débris envahis par la végétation sont, avec le pavillon, tout ce qui reste d’une ancienne succursale de chartreux. L’endroit est charmant d’abandon et de solitude ; la clairière, encaissée et abritée de partout, est très-mystérieuse. Le pavillon délabré menace un peu, mais M. Sylvestre assure qu’il durera plus longtemps que lui. Il a loué cela presque pour rien, et depuis deux ans on a refusé de lui faire payer son loyer, disant qu’on ne pouvait lui garantir la solidité de la construction, qu’on ne voulait pas y faire de réparations, qu’il était libre d’y demeurer gratis à ses risques et périls.

— J’ai toujours eu de la chance, moi, ajouta-t-il naïvement en me racontant le fait. Je suis un peu gêné, un peu paresseux, un peu vieux, et je trouve pour rien une habitation charmante dans un endroit pittoresque, bien caché, comme je les aime !… Voyez le beau lierre qui commence à gagner mon mur et qui m’en garantit la durée, car, vous le savez, le lierre est tout de bon l’ami des vieux murs. Il dégrade un peu les surfaces, mais il soutient les assises, et, grâce à lui, je suis en sûreté ici pour vingt ans. Vous me direz que j’en ai soixante-treize ? Eh bien, vivre encore ne m’épouvante point ; j’ai bon courage, et ce que Dieu voudra, je le veux.

— Vous êtes optimiste, cher monsieur : c’est peut-être une sagesse, cela !

— C’est peut-être aussi une vertu quand on connaît la vie. Allons, asseyez-vous. Je peux vous offrir un