Page:Sand - Mont-Reveche.djvu/198

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de ta faute ; mais ne revenons pas là-dessus, et, puisque tu t’es avisé si tard de mes vrais sentiments pour toi, réparons le temps perdu.

» Connais-moi tel que je suis. Je ne t’ai jamais menti, mais je ne t’ai point tout dit. Je suis ardent, tenace et violent dans mes passions, tu le sais ; mais ce que tu ne sais pas, c’est que je suis impressionnable et facile à enflammer comme une jeune pensionnaire. Ici, pour la dernière fois, je te permets de rire, car, en effet, la comparaison est fort plaisante ; cette prétention à la sensibilité des fibres, à la délicatesse des impressions, ne s’accorde guère avec ma musculature gauloise et mon masque sculpturalement paisible. Je me sers des expressions que tu as souvent consacrées à la description de mon solide et massif individu.

» À présent, je raconte : trêve de moqueries.

» Le lendemain de notre première visite à Puy-Verdon (c’était le jour du clavecin), m’étant assoupi sur un banc, dans le parc, je trouvai une branche de fleurs dans mon chapeau ; j’en mis un brin à ma boutonnière, et la première femme que je vis avec une fleur semblable à son corsage, c’était Olympe Dutertre.

» Mes yeux en firent la remarque, les siens aussi. Elle parut cependant fort calme, et moi, comprends-tu que je fis la bêtise de rougir ? Quand je te disais qu’il y avait du rapport entre moi et une jeune fille. Je sentis que j’étais écarlate, ce qui devait être fort laid et encore plus ridicule ; mais enfin, j’avais le feu au visage, et le sang me montait si bien à la tête, qu’un instant j’en eus la vue obscurcie. Mais, quand ce nuage se dissipa, je vis que la femme froide et pâle dont j’essayais, malgré mon apoplexie, de bien pénétrer le regard, était devenue tout aussi rouge que moi, et que ses yeux, après avoir ren-