Page:Sand - Nanon, 1872.djvu/124

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L’esprit des paysans comme celui des enfants est ouvert aux illusions. Nous ne pouvions nous imaginer dans notre oasis de Valcreux, les causes profondes qui conduisaient à des crimes violents notre belle révolution de 89. Toutes les nouvelles qui eussent dû nous faire pressentir ces crises étaient interprétées par des âmes incapables de les provoquer comme de les conjurer. L’insouciance de notre commune, l’optimisme de la petite colonie du moutier arrangeaient encore pour le mieux les événements accomplis. M. le prieur prétendait que la fuite du roi à Varennes était une fâcheuse action et une grande faute qui amènerait pourtant un bien.

— Louis XVI a eu peur de son peuple, disait-il ; c’est mal, car le peuple n’est pas méchant. Voyez comme les choses se sont passées ici ! Jamais une affaire aussi terrible que la vente des biens d’Église n’était arrivée dans le monde. C’est la bourgeoisie philosophe qui l’a voulue, et le peuple n’a fait qu’en profiter, mais sans colère contre nous et avec des ménagements auxquels on ne s’attendait pas. Eh bien, que le roi se confie à son peuple et bientôt son autorité lui