Page:Sand - Narcisse, 1884.djvu/179

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blanc et frais, la taille bien prise et très-grande pour son âge, la voix douce et même un peu grêle pour la stature et la force de la petite personne, encore un trait de ressemblance avec Narcisse et madame Pitard.

Quant à mademoiselle d’Estorade, je fus aussi surpris de la métamorphose opérée en elle que je l’avais été en voyant Narcisse. Ce qui me frappa, ce fut le changement de son costume. En prenant le parti de ne plus se cacher, elle avait compris qu’il n’était pas question de se produire pour attirer les regards, mais, au contraire, de se rendre assez semblable aux autres femmes pour n’être pas un objet de surprise. Elle était donc très-simplement, mais très-élégamment habillée, nullement en provinciale. Je la soupçonnai d’avoir fait venir toute une toilette de Paris, pour n’avoir pas à s’occuper de ces détails, qui prennent trop de temps aux personnes actives. Mais je la soupçonnai aussi de n’avoir jamais perdu les instincts de la femme, car elle portait avec beaucoup d’aisance et de grâce son ample robe de soie gris de perle et son grand fichu de mousseline brodée. Sa taille, à l’aise dans un corsage bien coupé, n’avait plus rien de désagréable, et même on y pouvait découvrir un charme particulier : c’était l’attitude intéressante de la faiblesse qui semble chercher un appui. Elle avait toujours une voilette noire sur la tête, mais une voilette de dentelle, qui laissait franchement voir les boucles devenues luxuriantes de sa cheve-