Page:Sand - Pierre qui roule.djvu/27

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pas donner le mauvais exemple à celui que je venais de sermonner, et que, si je ne voulais pas être accusé par madame Ouchafol de quelque « épouvantable égarement », il fallait me soustraire aux épanchements bachiques de ces bons faubouriens. Je m’esquivai donc adroitement, et, tout en regagnant la ville, j’eus la confusion de sentir que je ne marchais pas très-droit, que je voyais doubles les poteaux du fil électrique, et que j’avais des envies de rire et de chanter tout à fait insolites.

À mesure que je croyais approcher de la ville, le trouble augmentait. Mes pieds devenaient lourds, et, quand j’eus marché un peu plus que de raison, je constatai que la ville n’était plus sur la colline, ou que je n’étais plus sur le chemin de la ville. Belle situation pour un fonctionnaire, et surtout pour un homme des plus sobres qui, de sa vie, n’avait été surpris par l’ivresse !

Je pensai, car mon cerveau était resté parfaitement lucide, que cette ivresse était venue trop vite pour ne pas s’en aller de même. Je résolu d’attendre qu’elle fût dissipée, et, avisant une masure ouverte qui semblait abandonnée, j’y entrai et me jetai sur un tas de paille, sans trop m’a-