Page:Sand - Questions d’art et de littérature, 1878.djvu/283

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

mirables de beauté ou de fécondité, nous échappent si nous ne voyons qu’un petit nombre de types et si nous ignorons combien d’autres types s’enchaînent et se rattachent à ceux-là, en s’enchaînant à d’autres types encore, sans interruption, sans défaillance dans le génie inventif qui a présidé aux lois de la vie.

Vous ne comprenez donc Dieu, autant qu’il est donné à l’homme de le comprendre, qu’à la condition de laisser en vous le moins de lacunes possible dans la connaissance du monde que vous habitez. C’est par cette connaissance approfondie, c’est tout au moins par une compréhension nette de cette connaissance acquise à la science, que, pouvant procéder avec logique du connu à l’inconnu, vous arriverez à vous faire une idée douce, consolante et sage des mondes qui peuplent cet univers dont l’immensité vous écrase et dont le mutisme vous épouvante.

Pour monter, non pas jusqu’au sublime architecte, mais du moins vers le foyer de sa pensée oii le progrès (sa loi d’amour), nous attire sans cesse, il nous faut graviter le long des spirales de l’infini. La science est une rampe qui nous préserve du vertige, et ses classifications sont autant de paliers commodes où nous pouvons reprendre haleine avant de monter plus haut.

Telle est, si nous l’avons bien comprise, la pensée du petit livre que nous avons sous les yeux, et, pour en suivre l’esprit en vulgarisant notre propre pensée, nous dirons, en d’autres termes, à l’artiste et au poète que les nomenclatures et les dénominations épouvantent :

— Vous êtes les amants romanesques, les chevaliers errants de la nature. C’est là une belle mission, et je conviens avec vous que l’étude scientifique de la nature est une sorte de dissection que les artistes doi-