Page:Sand - Tamaris.djvu/235

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sence de notion du mal qui avait pour conséquence l’absence de la notion du bien.

— Ah ! vous avez tort ! répondait la marquise d’un air naïvement étonné, comme si jusque-là elle m’eût jugé infaillible ; oui, vrai, docteur, vous avez tort de dédaigner cet état divin de l’âme qui fait la beauté morale de l’enfance ! Est-ce que vous croyez que Paul sait ce que c’est qu’une mauvaise action ?

— Non, sans doute ; mais il faudra bien qu’il l’apprenne.

— Ah ! il l’apprendra toujours trop tôt, et la bonne Nama aussi ! C’est leur mois de mai, à eux ! Laissons-le fleurir.

Je voyais madame d’Elmeval presque à toute heure. Le matin, elle amenait Paul au baron. La leçon durait deux heures, et, pendant ce temps, je me promenais avec elle dans le jardin Caire, ou je lui lisais au salon les journaux et les brochures nouvelles. Elle rentrait avec Paul, qui déjeunait, jouait et travaillait. Pendant ce travail, elle enseignait la lecture et l’écriture françaises à mademoiselle Roque. À deux heures, à moins de courses exceptionnelles, nous montions en voiture avec Nama, le baron, et quelquefois Aubanel ou Pasqnali, pour rentrer à six heures. Paul travaillait encore jusqu’à sept. On dînait souvent tous ensemble, tantôt chez nous, tantôt chez la marquise, et souvent on causait jusqu’à neuf