Page:Sand - Tamaris.djvu/60

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— C’est donc un séducteur, ce lieutenant ?

— Eh ! oui, et dangereux même !

— Ce n’est pourtant pas un roué, je vous jure ; il a trop de cœur et d’esprit…

— C’est pour cela. Je le sais bien, qu’il est charmant, et il a un grand attrait pour les femmes, c’est qu’il les aime toutes.

— Toutes ?

— Toutes celles qui sont jolies.

— Et il les aime toutes à la fois ?

— Ça, je n’en sais rien. On le dit, mais j’en doute ; seulement, je sais que la succession est rapide, et qu’il s’enflamme comme l’étoupe.

— Mais vous pensez que madame Martin… ?

— N’est pas pour son nez, je vous en réponds !

— Elle est trop haut placée ?…

— Vous voulez me faire parler, vous n’y réussirez pas !

— Est-ce que j’insiste ?

— Non ; mais vous courez des bordées autour de moi ; or, je suis un rocher, vous ne pourrez pas m’attendrir.

M. Aubanel était vif et enjoué, et le secret n’avait sans doute pas une grande importance, car il mourait d’envie de me le confier ; mais, au moment de profiter de l’occasion, je m’arrêtai, saisi d’un respect instinctif pour cette femme que j’avais vue un quart