Page:Sand - Tour de Percemont.djvu/204

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La figure d’Henri fut un moment contractée par un rictus d’angoisse et de pitié ; puis tout à coup, prenant le dessus avec l’héroïsme de la bonne conscience, il répondit :

— Mon père est sévère, mademoiselle Marie ; mais en somme il ne vous dit rien que je ne vous aie dit à vous-même, ici, hier soir, et seul avec vous.

Mademoiselle de Nives se tourna alors vers Jacques, comme pour lui demander aide et protection dans sa détresse. Elle vit qu’il pleurait et fit un pas vers lui. Jacques en fit deux, et, emporté par son bon naturel autant que par son manque de savoir-vivre, il l’entoura de ses bras et la serra sur son cœur en disant :

— Oh ! moi, tout cela n’est pas ma faute ! Si vous êtes coupable envers moi, je n’en sais plus rien du moment que vous souffrez ! Voulez-vous mon sang, voulez-vous mon honneur, voulez-vous ma vie ? Tout cela est à vous, et je ne vous demande rien en échange, vous le savez bien.

Pour la première fois de sa vie et grâce à la rudesse de mes attaques, Jacques, frappé au cœur, avait trouvé la véritable éloquence. L’expression du visage, l’accent, le geste, tout était sincère, par conséquent sérieux et fort. Ce fut une révélation pour nous tous et surtout pour mademoiselle de Nives, qui ne l’avait encore