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Comme cette journée est longue ! Nous n’avons rien à faire, rien à lire. Quel supplice ! Le défilé des lieutenants appelés par l’homme de Hansi s’effectue lentement, lentement. Car, en même temps que nous, on interroge aussi peu à peu les capitaines et même les officiers qui sont arrivés hier.

Mentionnerai-je la venue de trois soldats français, un chasseur à cheval, un marsouin et un lignard, qui doivent aider Rousski et le Belge ? Ils ont quitté tout récemment le camp de Darmstadt. Ils nous racontent leur misère, qui est tragique, leur faim, les mauvais traitements qu’ils ont à subir pour la moindre peccadille. Ils supportent tout courageusement, parce qu’ils estiment que la rage d’une victoire incertaine est cause des vexations que les Allemands leur imposent. Dans leur martyre, ce qui les soutient aussi, c’est la détresse des populations civiles. Ils l’ont vue de près. Elles ont faim. Elles sont fatiguées de la guerre. Elles n’ont plus beaucoup d’espoir. Elles sont persuadées que la lutte contre la France est une erreur, parce que le seul ennemi véritable est l’Anglais, qu’on hait. Toutes choses dont nous avions pu nous assurer par nous-mêmes en causant avec les soldats que nous avons rencontrés depuis le ravin du Bois-Chauffour, mais qui se confirment par les nouvelles que nous recueillons chaque jour à droite et à gauche.

Les propos des trois prisonniers de Darmstadt nous sont d’un précieux secours. Il faut si peu de chose pour que la force de résistance augmente ou diminue dans le cœur d’un captif ! La longueur des heures est périlleuse. Cette chambre no 28 est une cage sinistre. Entendre les conversations, d’ailleurs peu