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Page:Sarcey - La route du bonheur, 1909.djvu/309

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les trois vœux.

oiseuses les excèdent, leurs nerfs sont tendus jusqu’à crier et leur joli visage n’exprime que spleen.

Elles sont très malheureuses, et surtout très mécontentes d’elles-mêmes.

J’en observe d’autres, moins favorisées de la nature, et tout aussi déplaisantes d’humeur. Elles enragent de leur médiocrité, de la situation de leur mari, de leur maison, de leurs enfants, des domestiques qu’elles ont, et de celles qu’elles n’ont pas, et leur visage s’enlaidit de tous les bas sentiments d’envie qu’il exprime. Elles ne savent mesurer que leurs peines, jamais celles des autres, et repoussent avec mépris les joies que, d’ailleurs, elles déclarent nulles. Elles manient la comparaison avec une partialité déconcertante : d’un côté, tous les gens heureux, c’est-à-dire l’univers entier ; de l’autre, leur personne, c’est-à-dire leur pauvre âme d’écorchée vive, toujours déçue, éternellement aigrie, attirant et retenant le malheur à force de le redouter.

Elles sont très malheureuses, et surtout très mécontentes d’elles-mêmes.

Il en est d’autres qui flottent, telles des épaves ; elles vont là où le vent les pousse, tantôt ici, tantôt là : elles ne font pas le mal, elles ne font pas davantage le bien. Distinguer la bonne