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��Chapitre IV.

§ 9. Indices de la pluralité des a dans la langue mère indo-européenne.

Dans le système d'Amelung, Vo gréco-italique et l'a gréco- italique (notre a) remontent à une même voyelle primordiale; tous deux sont la gradation de Ye. S'il était constaté que dans les lan- gues ariennes la voyelle qui correspond à l'a gréco-italique en syllabe ouverte est un a long, comme pour o, cette opinion aurait trouvé un point d'appui assez solide. A la vérité, le nombre des exemples qui se prêtent à cette épreuve est extraordinairement faible. Je ne. trouve parmi les mots détachés que ciTrô — ah, skr. âpa', dKUUV^ skr. âçayi (au cas faibles, comme açwâ, syllabe fermée); aï5, skr. àgâ; à^r\ç>, véd. àthan(?). Mais du moins les thèmes verbaux de âga-ti, europ. Ag; bhâga-ti, europ. bkAg; mâda-ti, gréco-it. ■mAd; yâga-ti, gr. àf, vâta-ti, europ. tvAt (irland. fàith, lat. vates) nous donnent une sécurité suffisante. Si l'on recherche au contraire les cas possibles d'un â arien correspondant, en syllabe ouverte, à un a (a) gréco-italique, on en trouvera un exemple, en effet assez im- portant : skr. (îgas, en regard du gr. âxoç qu'on s'accorde à séparer de âtoç, cÎTioç etc^. Le cas est entièrement isolé, et dans notre propre système il n'est point inexplicable (v. le registre). Faire de ce cas unique la clef de voûte d'une théorie sur l'ensemble du vocalisme serait s'affranchir de toute espèce de méthode^.

On pourra donc sans crainte établir la règle que, lorsque les langues européennes ont a, en syllabe ouverte comme en syllabe fermée l'arien montre a bref. Mais ceci veut dire simplement que l'a n'est pas un a long: il arrive en effet que dans certaines

��1. he T de àKOvT- est ajouté postérieurement; cf. Xeov-T, fém. Xéaiva.

2. Pour des raisons exposées plus loin, nous serons amené à la conclusion que, si une racine contient a, le présent a normalement â long et que les thèmes comme à^a-, hhàga- etc. n'ont pu appartenir primitivement qu'à l'aoriste. Mais comme, en même temps, c'est précisément l'aoriste, selon nous, qui laisse apparaître a à l'état pur, il ne saurait y avoir d'inconséquence à faire ici de ces thèmes un argument.

3. Le skr. vyàla (aussi vyàda) «serpent» est bien probablement proche parent du gr. ûdXri • OKiûXriE, mais il serait illusoire de chercher à établir entre les deux mots l'identité absolue: cf. €ÙXri, ïouXoç.

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