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Page:Sauvé - Le Folk-Lore des Hautes-Vosges, 1889.djvu/279

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le mois de septembre

chaire et parla à peu près en ces termes à ses paroissiens de Ventron :

— « Dans le courant de la semaine dernière, vous m’avez apporté un mort qui n’était pas mort. Où aviez-vous la tête ? Sans la présence d’esprit et le courage de notre fossoyeur, ce mort, qui n’était pas mort, serait parvenu certainement à s’échapper de nos mains, et voyez-vous le scandale ? Nous serions devenus la risée de nos voisins. À l’avenir, prenez soin de ne pas recommencer cette mauvaise plaisanterie, car, s’il vous prenait fantaisie de faire enterrer des morts qui ne fussent pas morts et bien morts, vous auriez affaire à moi, et je vous ferais voir de quel bras je me mouche. »

Pour conjurer l’effet d’une telle menace, les gens de Ventron prirent, à partir de ce moment, l’habitude d’envoyer par eau leurs morts à l’église, à la façon des flotteurs de bois, et il en fut ainsi tant qu’ils restèrent attachés à la paroisse de Saulxures. Ce n’était pas toujours aisé, mais on s’en tirait tout de même, sans attendre toujours les grandes eaux. Le ruisseau de Ventron avait beau faire le récalcitrant, on finissait par arriver à la Moselotte, et de là les cercueils descendaient, presque seuls, au gué de Bâmont où le clergé venait faire la levée des corps. »

Il serait injuste de ne pas dire ici un mot des