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d’attribuer calomnieusement a Jean-Baptiste Say une spéculation blâmable sur la publication de son livre. Cette entreprise lui était cependant complètement étrangère, ainsi qu’il l’a du reste établi dans une réclamation adressée aux rédacteurs de la Revue encyclopédique[1].

C’est ainsi que Jean-Baptiste Say identifiait sa vie au développement et à la diffusion d’une science à laquelle il s’était voué dès sa jeunesse, et qu’il avait cultivée avec cette persistance et cet amour du vrai, qui conduisent à de grands résultats. La théorie des débouchés, en prouvant que chaque nation est intéressée à la prospérité de toutes les autres, exercera la plus heureuse influence sur le sort de l’humanité. Celle des produits immatériels permet de réparer les premières injustices des maîtres de la science. Adam Smith regardait comme improductifs ceux qui occupent les premières fonctions de l’État. La doctrine des produits immatériels les replace dans l’économie de la société ; elle rattache l’économie politique à toutes les parties du corps social, elle permet de comparer les services de tous les hommes avec les rétributions qu’ils en recueillent ; et une plus juste appréciation des travaux de chacun tend dès lors à l’amélioration des institutions politiques que la doctrine de Smith laissait en dehors de cette étude.

J. B. Say a rattaché les richesses naturelles à l’Économie politique, non qu’il ait indiqué la manière de les créer, puisqu’elles ne sont pas de façon humaine, mais en montrant leurs rapports avec la richesse échangeable et dans quelle proportion elles font partie de la richesse des nations. On lui doit enfin l’analyse complète de la production et de la consommation des richesses, qu’il a réduites à n’être qu’une création et une destruction de l’utilité des produits. C’est cette analyse tout à la fois simple et profonde qui l’a mis à même de déterminer l’importance des différents travaux dont se compose l’industrie. La doctrine des frais de production, ainsi comprise, devait tout éclaircir et donner l’explication de cette proposition en apparence paradoxale : La richesse des nations se compose de la valeur échangeable de toutes les choses qu’elles possèdent, et cependant les nations sont d’autant plus riches que le prix des choses est plus bas.

La théorie de la production commerciale, entièrement méconnue par les économistes du dernier siècle, à peine entrevue par Verri et par Adam Smith, a été mise dans tout son jour. En général, on doit à M. Say d’avoir bien posé presque toutes les questions d’Économie politique, et d’en avoir rendu la solution facile pour tout homme de sens qui prend la peine de lire ses écrits.

Pendant que sa réputation grandissait au dehors, l’auteur se renfermait dans une vie modeste, il se produisait rarement dans le monde bruyant, il vivait à l’écart, entouré de sa famille et d’un petit cercle d’amis. C’est la

  1. Voir page 286 de ce volume.