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Page:Say - Chailley - Nouveau dictionnaire d’économie politique, tome 1.djvu/95

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73 ASSISTANCE iers dans son célèbre Rapport à away care ! The parih is bound for ever ! »

duite M. Thiers dans son célèbre Rapport à l’Assemblée nationale de 1848 « L’État, comme l’individu, doit être bienfaisant, mais comme lui, il doit l’être par vertu, c’est-àdire librement. Si l’individu a des vertus, la société n’en peut-elle avoir  ?. »

Mais on a prétendu qu’il existe un droit à l’assistance et que, en conséquence, l’assistance publique doit être non seulement officielle, mais légale, c’est-à-dire sanctionnée par la loi. Et ce n est pas seulement une thèse d’école ; car plusieurs grands pays ont organisé un système de charité légale, tandis que les autres, comme la France, ont laissé à l’assistance un caractère facultatif, si bien que, dans ces derniers, les communes et les départements ne sont pas imposés obligatoirement pour subvenir aux frais de l’assistance, et que les dépenses de l’assistance n’y figurent que parmi leurs dépenses facultatives.

Le système particulier d’assistance publique, auquel on donne habituellement la désignation du système de la charité légale, se distingue par les caractères suivants, lesquels sont les conséquences forcées du principe qui lui sert de base 1° l’État ne se propose pas seulement de donner un secours ; il se reconnaît formellement débiteur et se considère comme obligé d’assurer la subsistance de tout indigent ; celui-ci, à son tour, peut la réclamer comme un véritable droit. De là, la nécessité d’une contribution spéciale, d’une taxe des pauvres, destinée à pourvoir aux dépenses de ce service ; 2° la dette ne peut être payée pour chaque indigent que dans une localité déterminée ; il faut dès lors fixer la circonscription territoriale dans laquelle il peut réclamer le secours, il faut, en d’autres termes, assigner un domicile de secours 3° la loi qui se charge de pourvoir aux besoins des indigents peut leur interdire la mendicité 4° l’État, en même temps qu’il assure le secours à l’indigent, peut, si celui-ci est valide, l’obliger à travailler et lui donner une tâche à accomplir. Aussi partout où existe la charité légale, y a-t-il des établissements particuliers (workhouses, en Angleterre), où l’on occupe les indigents valides. En résumé taxe des pauvres, domicile de secours, interdiction de la mendicité, maisons de travail, tels sont les caractères inséparables du système d’assistance légale.

Or rien n’est plus dissolvant, ni de nature à exercer de plus funestes ravages. On l’a trop souvent remarqué, en Angleterre, avec la poor law. « Au diable les soucis, chantent les mineurs de Newcastle, dans un refrain célèbre Au diable le chagrin La paroisse n’est-elle pas là Hang sorrow ! Cast

away care ! The parih is bound for ever ! » A quoi bon, en effet, se priver et économiser pour l’avenir  ? A quoi bon la prévoyance et le sobriété  ? Il est meilleur de vivre sans souci du lendemain. La paroisse n’est-elle pas là  ? Cette institution éteint tout sentiment d’honneur et de dignité chez ceux qui y recourent l’effronterie, souvent la menace et l’insulte, accompagnent leur réclamation elle entretient l’hostilité entre les diverses classes de la population. Le riche devient un créancier odieux ; « en Angleterre, la pauvreté est infâme», a dit un Anglais. Soulage-t-elle du moins  ? Non car elle alimente la misère, en énervant les deux qualités qui agissent préventivement contre la misère, à savoir la prévoyance et le ressort individuel. D’ailleurs, il faut l’ajouter, les secours sont mal distribués, les administrateurs s’occupant moins de la bonne justice que du souci de leur comptabilité. La détermination du domicile de secours donne lieu à de grosses difficultés et provoque parfois entre les paroisses, qui se renvoient réciproquement un indigent, les plus scandaleux débats. Une cour trimestrielle d’assises, en Angleterre, a jugé, autrefois de ce chef, dans une année, 4700 appels. Lord Brougham nous apprend que, pendant la d urée de ces fonctions de grand chancelier, une petite commune a dépensé 72 livres sterling (1800 francs) pour faire déterminer le domicile de secours d’un seul individu. A défaut de procès, ce sont les procédés les plus criants et les plus condamnables, auxquels les localités ont recours pour se débarrasser d’un assisté et en rejeter le fardeau sur une autre paroisse. On a vu de bons et honnêtes ouvriers, expulsés par une commune désireuse de les empêcher, par une prolongation de séjour, d’acquérir le domicile de secours. Des femmes enceintes ont reçu une somme d’argent afin d’aller accoucher ailleurs. Nous ne multiplierons pas les exemples 1. Le domicile de secours crée une répar tition vicieuse de la population ; il empêche les migrations d’ouvriers et le nivellement des salaires. Il n’est pas jusqu’à l’obligation du travail qui ne donne lieu à de gros inconvénients. On a créé des occupations dérisoires pour les pauvres porter des pierres à une certaine distance et les rapporter ; creuser un fossé etle combler aussitôt après ! On arrive ainsi à ridiculiser le travail, en lui enlevant son caractère de productivité, et en en faisant un châtiment ou plutôt une vexation.

Ah que nous comprenons bien l’aveu échappé à la plume honnête du pasteur Na1. Ces inconvénients sont moindres depuis la réforme du la Poor Law en 1834.


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