Page:Say - Mélanges et correspondance d’économie politique.djvu/186

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dans les reproches qu’on fait à un gouvernement que par des motifs personnels ? Voulez-vous savoir quelles sont les provocations que j’ai reçues de Napoléon ? les voici :

Investi d’un pouvoir sans bornes, au lieu de l’employer pour le bien de l’humanité, Bonaparte ne s’en est servi que pour l’opprimer. La France, au prix de beaucoup de malheurs sans doute, jouissait de l’inestimable avantage d’être débarrassée de tous les abus d’un régime suranné ; l’homme qui pouvait, s’il l’eût voulu, être l’homme du siècle, agissait sur ce que nous appelons une table rase. Toutes les institutions étaient à faire, elles pouvaient être le résultat des lumières de notre époque, nul obstacle, nul danger, n’étaient à redouter pour Napoléon ; il n’avait même aucune peine à prendre, il ne fallait que protéger ce qui était bon et honorable, et du reste jouir en paix. La gloire ni la puissance, rien ne lui était disputé. Dès Fannée 1802, personne n’aurait osé attaquer le premier un lion devenu pacifique. Sans guerres, sans intrigues diplomatiques, l’exemple seul de la France exerçait une salutaire influence sur le reste de l’Europe. Les hommes de mérite du monde entier apportaient à Bonaparte le tribut de leurs talens et lui en laissaient le profit. Ils pardonnaient même ce qu’il