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DE LA DISTRIBUTION DES RICHESSES.

et les consommateurs jouiront alors d’une douceur de prix et d’une multiplication de jouissances qui ne coûtera plus rien à personne : car les marchandises reviendront moins cher aux négocians, qui les vendront à plus bas prix ; il en résultera au contraire un grand développement d’industrie, et de nouvelles voies ouvertes à la fortune[1].

CHAPITRE III.

Du prix en argent et du prix nominal.

Quand on paie un objet 20 francs, son prix en argent est 100 grammes à 9 deniers de fin, ou 90 grammes d’argent pur.

Son prix nominal est 20 francs ; c’est le nom que l’on donne à cette quantité d’argent frappée en monnaie.

Comme la valeur de la monnaie n’est pas dans le nom, mais dans la chose qui sert de monnaie, lorsque le nom vient à changer, le prix nominal change aussi, quoique le prix en argent ne change pas. À une certaine époque trois livres tournois contenaient une once d’argent ; à une autre époque il fallait six livres tournois de notre monnaie pour faire une once. Un objet qui coûtait trois livres à la première époque, et six livres à la seconde, coûtait le même prix en argent : nominalement il avait doublé.

Le prix en argent d’une chose dépend du rapport qui se trouve entre les frais de production de l’argent et ceux de la chose. Si cinq hectolitres de blé coûtent cent grammes d’argent, c’est probablement parce que cent grammes d’argent coûtent autant à produire que cinq hectolitres de blé ;

  1. C’est ce que Bonaparte aurait pu opérer avec les vastes moyens dont il a disposé. Il aurait civilisé, enrichi et peuplé le monde, au lieu de le ravager ; mais, pour réussir, une semblable entreprise devait être conçue sans esprit de conquête et de domination. Elle se réalisera plus tard. Une politique plus éclairée se gardera de mettre obstacle à l’établissement d’états indépendans d’origine européenne, dans la partie habitable de l’Afrique ; car de pareils établissemens sont dans l’intérêt de toutes les nations. Elles seront heureuses de trouver sur les cotes de Barbarie, au lieu de peuples féroces, ennemis nés des Européens et vivans de brigandages, des nations essentiellement pacifiques et commerçantes, comme les États-Unis, mais beaucoup plus rapprochées de nous et sous un plus riche climat. La Méditerranée ne sera plus alors qu’un vaste lac sillonné en tout sens par les industrieux habitant qui peupleront ses rives.