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MONÉTAIRE

par le nombre de leurs succursales, mais pourtant en concurrence mutuelle. Si l’on conserve l’organisation de la Banque d’An- gleterre, c’est surtout d’après le principe que ce n’est pas la peine de touclier à une orga- nisation qui existe et ne fonctionne pas trop mal (V. Bacehot’.

8. Discussion moderne.

Les idées erronées sur toutes ces ques- tions, reviennent continuellement. Parfois même c’est dans les mêmes formes qu’elles réapparaissent, comme, par exemple, lors de la réforme monétaire austro-hongroiso  : l’achat d’or, pour la réforme, au moyen de billets inconvertibles, augmenta la circulation de ceux-ci, et créa, jxir là, un nouvel agio. On prétendit, tout comme dans la période de Ricardo et du Biillion report, que c’était l’or qui était apprécié, que l’émission ne ré- pondait qu’aux besoins de la circulation et du marché monétaire et qu’il ne fallait en aucune manière augmenter le taux de l’es- compte, pour diminuer la circulation et atti- rer des valeurs en or de l’étranger. L’on a raisonné de la même manière dans d’autres pays à monnaie dépréciée, en Italie, en Russie, dans TAmérique du Sud. On retrouve les mêmes arguments dans les discussions monétaires aux États-Unis. Plus souvent en- core, revient cette théorie qui considère les billets comme formant des moyens de circu- lation d’une nature tout à fait difTérente des autres formes du crédit de circulation, ou encore ce sont des doctrines qui ressemblent, sous plusieurs rapports, à celles de la Cur- rency School.

Nous avons cité Tooke comme un des au- teurs de la Banking School qui démontrent que ce n’est pas l’augmentation de circulation qui excite à la spéculation et à Taccroisse- ment des prix  ; qu’elle les suit au contraire. Le continuateur de la grande Histoire des prix de Tooke, M. Newmarch, autre grand finan- cier delà cité de Londres, est cependant lui- même au nombre de ceux qui ont exagéré l’influence des découvertes d’or en Californie et en Australie, comme le faisait, du reste, non seulement Wolowski, un demi-mercanti- liste, mais Michel Chevalier lui-même. M. Neu- march explique leur influence spécialement par le fait qu’elles augmentent la réserve des banques, et agisssent, par là, sur la spé- culation et les prix. La vérité, c’est qu’une telle influence est aussi bien exercée par d’autres moyens  ; en 1872, par exemple, après la guerre franco-allemande, elle le fut non seulement par le grand accroissement de billets dans les deux pays, mais aussi par le déplacement des capitaux dû aux paiements


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de la France à rAllemagne et encore plus par les seules idées de hausse et de confiance qui se développaient. La hausse du prix et l’expansion des moyens de crédit sont même régulièrement dues à cette cause plutôt mo- rale, à des vagues montantes et descendantes de l’opinion générale (V. Crises). Il en est de même de la baisse générale et de la diminu- tion du crédit dans la période de liquidation. La Californie et l’Australie auraient, sans doute, exercé, en grande partie, la mêm& influence si une rapide colonisation produite par quelque autre cause avait excité la spé- culation générale.

Liée à cette idée exagérée chez Newmarch et autres, et plus érigée en théorie, la doctrine de la quantité se présente  ; d’après elle, les prix sont considérés comme déterminés, si- non seulement par l’or ou par l’or et l’argent, au moins parle métal avec les billets de banque ou d’État. Pour réfuter cette théorie, il suffit de rappeler ce que nous avons dit sur la composition actuelle des moyens de circula- tion. C/est un argument des bimotallistes, pour prouver les conséquences malheureuses de l’élimination du métal blanc, que les prix varient avec la masse de métal. Que ceci ne soit pas exact, c’est ce qu’on voit déjà par le rôle des billets, dont la masse a vai’ié par milliards dans les périodes d’ac- tivité commerciale et dans celles de restriction (Voyez, par exemple, les écrits de l’auteur autrichien, Neumann Spallart)  ; mais, pour les prix, le même rôle est joué aussi par les autres formes de crédit de circulation. La masse de métal n’est qu’un des éléments qui influencent la hausse et la baisse, et, pour les courtes périodes, si bien décrites par Clément Juglar, le crédit exerce même l’in- fluence prépondérante. L’énorme fluctuation de la masse de circulation, y compris les billets, qui a augmenté au lieu de diminuer pendant la crise américaine de l’été de 1893, a été une curieuse leçon de choses qui dé- montre combien il est vrai que la circula- tion dépend maintenant beaucoup plus du crédit que de la quantité de monnaie.

On retrouve cette idée de l’influence de la quantité du métal, d’abord chez des bimétal- listcs, comme le savant M. Fox^seli, de Cam- bridge, ainsi que dans les idées populaires qui régnent aux Etats-Unis, et dans une discus- sion qui a eu lieu en Danemark, il y a quel- ques années, notamment chez M. ’NV. Schar- ling, combattu par M. Falbe Hansen. Mais on la rencontre aussi chez de bons monomé- tallistes, comme Sir Robert GifTen, et même chez M. Goschen. Celte idée préconçue in- flue quelquefois, d’une manière fâcheuse, sur leurs études des mouvements des prix  ;


CIRCULATION