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Page:Scarron-oeuvres Tome 6-1786.djvu/20

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Merlin.

Et vos lettres, monsieur ?

D. Sanche.

Et vos lettres, monsieur ? Garde-les ; qu’ai-je à faire
De lire les fatras d’un impertinent frére,
Puisqu’il est dans Madrid, et que je le vais voir ?
Mais dis-tu vrai, Merlin, que tu n’as pu savoir
Le nom ni le logis de sa femme future ?

Merlin.

Vous savez comme il est défiant de nature,
Qu’il fait secret de tout, et de rien bien souvent,
Et qu’il n’a pour conseil que son chef plein de vent :
Mais vous, mon cher Seigneur, qu’il ne vous en déplaise,
Comment vont vos amours avec la Portugaise ?

D. Sanche.

Stefanie !

Merlin.

Stefanie ! Elle-même.

D. Sanche.

Stefanie ! Elle-même.Elles vont assez bien ;
Car elle me caresse, et ne demande rien.

Merlin.

Tant mieux.

D. Sanche.

Tant mieux.Je la vais voir, parce que sa demeure
Est proche de la mienne, et qu’on m’ouvre à toute heure,
Et l’on m’y voit souvent n’ayant que faire ailleurs,
Et manque aussi d’avoir des passe-tems meilleurs.
J’y demeure parfois pour changer moins de place.
J’en sors pour en changer, quand la mienne me lasse ;
J’y rêve par coutume, et jamais par amour ;
Ma paresse souvent m’y retient tout un jour ;
Quand j’y rêve, elle croit, comme elle est vaine et belle,
Que je ne puis rêver pour autre que pour elle ;
Et lorsque je me tais par taciturnité,
Que c’est par le respect que j’ai pour sa beauté.
Je lui dis des douceurs, qui ne me coûtent guére,
Et souvent je me plais de lui rompre en visiére,