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Page:Scarron - Le Virgile travesti, 1889.djvu/140

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Et parlez moins, ou parlez mieux.
Vous faites bien le furieux
Contre une femme désarmée :
Quand bien vous l’auriez assommée,
Seriez-vous mieux d’un quart d’écu ?
Vous nommez son mari cocu,
Avez-vous manié sa tête ?
Est-il cornu comme une bête ?
Dites-moi, seriez-vous content
S’il en disait de vous autant,
Méchant fanfaron que vous êtes ?
Vous ne savez ce que vous faites.
Vous auriez bien plus de raison
De retourner à la maison
Secourir votre pauvre père,
Qui sans doute se désespère,
Non tant des Troyens déconfits
Que de Créuse et de son fils.
Ce cher fils, cette chère femme,
A qui, sans moi, le Grec infâme
Aurait pis fait qu’aux pauvres gens
Ne font les diables de sergents.
Vous accusez la pauvre Hélène
D’avoir perdu la gent troyenne,
Vous n’êtes qu’un mal avisé,
Vous vous prenez au plus aisé ;
Le Destin seul en est la cause,
Qui de nos dieux mêmes dispose.
Tout dépend de sa volonté ;
Il a dès longtemps arrêté
Que la grande ville de Troie
Serait faite des Grecs la proie.
A moins que d’être illuminés,
Les mortels plus loin que leur nez
Ne peuvent jamais voir les choses,
Bien loin d’en connaître les causes :
Qu’ainsi ne soit, présentement
Vous ne pourriez voir nullement,
Si je ne dissipais la nue
Qui vous en empêche la vue,