Aller au contenu

Page:Scarron - Le Virgile travesti, 1889.djvu/253

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

Son cœur n’y saurait consentir ;
Et cependant il faut partir.
Il gratte et regratte sa tête
Pour trouver un prétexte honnête
De quitter ces aimables lieux :
Il pourrait alléguer les dieux ;
Mais une amoureuse en colère
Aux divinités peu défère.
Le pauvret, que fera-t-il donc,
Etant confus s’il le fut onc ?
Je conseillerais le beau sire,
De s’en aller sans en rien dire,
Quitte pour crier au larron.
En cet endroit, maître Maron
N’a point approfondi l’affaire,
Tellement qu’il se peut bien faire
Que maître Aeneas était fou
D’avoir toujours femme à son cou,
Et volontiers pliait bagage ;
Mais, comme il était homme sage,
On n’a jamais su tout de bon
Si cela lui fâchait ou non.
Il fit venir maître Sergeste,
Mnesthée, et Cloanthe, et le reste
De ses amis les plus discrets,
Auxquels il dit : "Soyez secrets ;
Ramassez tous vos équipages :
Les plus prompts seront les plus sages.
Qu’on mette au plus tôt les vaisseaux
En état de fendre les eaux ;
Enfin que la flotte s’apprête,
Et ne vous rompez point la tête
Du sujet que nous en avons :
Soyons secrets, et nous sauvons.
De mon côté, j’aurai la peine
D’y faire consentir la reine.
En lui faisant un tel discours,
Je sais le péril que je cours ;
Je ferai couler mainte larme,
Je causerai bien du vacarme,