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Page:Scarron - Le Virgile travesti, 1889.djvu/440

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Les grands parleurs et les copistes,
Les fats qui contrefont les tristes,
Les plus importuns des humains ;
Ceux qui montrent leurs belles mains,
Ceux qui se disent sans mémoire,
S’imaginant qu’ils feront croire
Qu’ils en ont plus de jugement,
Ce que l’on croit pieusement ;
Ceux qui donnent des estocades,
Ceux qui disent qu’ils sont malades,
Et ne le sont que de l’esprit,
Comme on voit par leur appétit ;
Les femmes qui toujours demandent,
Les vieillards qui toujours gourmandent,
Ceux qui nous aiment malgré nous,
Les faux sages, les méchants fous,
Ceux qui content toujours leurs songes
Qui sont bien souvent des mensonges,
Ceux qui ne disent jamais mot,
Finesse ordinaire à tout sot
Qui de soi ne peut rien produire,
Et qui croit que par un sourire
Et par un silence affecté
Il couvre sa stupidité
Ou témoigne sa modestie
En ne chantant pas sa partie ;
Foin de ces chanteurs de tacet,
Soit en fauteuil, soit en placer
Soit en ruelle, soit en rue !
Un bon esprit n’est pas si grue
Qu’il ne soupçonne le revers
De ces esprits clos et couverts ;
Ceux de qui l’haleine est bien forte,
Ou bien, pour parler d’autre sorte,
Dont l’haleine sent les porreaux ;
Les hommes qui font trop les beaux,
Enfin tous ceux et toutes celles,
Tant les mâles que les femelles,
Qui font les vivants enrager,
Ne doivent nullement songer