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Page:Scarron - Le Virgile travesti, 1889.djvu/442

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Les nobles fondateurs de Troie,
Marchant gravement à pas d’oie,
Barbe en pointe et chapeau pointu,
Y discourent de la vertu :
Ilus, Dardanus, Assarace,
Et cent autres de même race ;
Les uns font leurs chevaux trotter,
Les plus hardis les font sauter ;
D’autres font leurs chariots courre,
Et d’autres jouent à la mourre.
Les plus vieux et les plus sensés
Y parlent des siècles passés,
Ou bien font des contes pour rire.
Ceux qui font rage de la lyre,
J’entends les poètes divins,
Alors qu’ils sont entre deux vins,
Par défi se chantent des carmes,
Qui font rire ou verser des larmes,
Selon que ce qu’on a chanté
Rend triste ou met en gaieté.
Celui qui pour le peuple endure,
Que l’on relègue ou claquemure ;
Les Carons, qui font toujours bien,
Comme fait Deslandes-Payen ;
Les prélats, à droit comme à gauche,
Nets de toute sale débauche,
Et qui n’ont point eu de Laïs ;
Ceux qui sont morts pour leur pays ;
Les pauvres de vie inconnue,
De vertu rare, quoique nue ;
Les beaux esprits point médisants ;
Les peintres, nobles artisans,
Qui sont de leurs jours la merveille,
Y sont le laurier sur l’oreille,
Faisant bonne chère à leurs sens
Par mille plaisirs innocents ;
Enfin les hommes de mérite,
Dont la troupe est là fort petite
Aussi bien qu’en ce monde ici,
Sont là, sans peine et sans souci,