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Page:Schœlcher - De l'esclavage des Noirs, 1833.djvu/10

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qu’ils veulent gagner vite, on conçoit facilement qu’ils deviennent plus barbares que les autres ; car ils courent chercher une position que les colons regrettent souvent d’être obligés de prendre, et le premier effet de l’avarice est d’étouffer les cris de l’humanité.

Mais pourquoi s’étonnerait-on de voir même un voyageur indifférent devenir aux colonies partisan de l’esclavage ? Sitôt qu’il arrive, il est lancé au milieu des blancs ; il n’entend et, pour ainsi dire, ne voit qu’eux ; on s’empare de lui, et on le force à rougir de sa compassion, en lui montrant les noirs, faits depuis des siècles au joug qui les brise, acceptant sans colère l’humiliation et les souffrances. Il est bientôt converti, car il tenait peu à ses premiers doutes, et il suffit à cet homme de son isolement pour le rendre inhabile à repousser les influences qui l’entourent, surtout dans un pays où les principes généreux qu’il peut apporter sont regardés par les gens que sa position l’appelle à fréquenter, comme des préjugés subversifs de tout ordre, comme des sophismes qui s’attaquent à leur existence. Alors on comprend très-bien que n’étant point animé d’un esprit particulier de réforme, ignorant la question, et n’ayant pas le courage, en fréquentant les nègres ou les hommes de couleur, de s’exposer volontairement et sans intérêt à l’abandon, au mépris, à la pro-