Page:Schœlcher - De l'esclavage des Noirs, 1833.djvu/9

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J’accepte donc volontiers la discussion avec les propriétaires d’esclaves, lesquels aussi bien sont les seuls à oser encore se proclamer champions de l’esclavage ; mais j’espère que, de leur côté, ils ne s’inquièteront plus de savoir si j’ai long-temps habité les Antilles.

Les faits que je rapporte sont-ils vrais ? les raisonnemens auxquels je me livre sont-ils exacts ? C’est là tout ce qu’il faut décider. À cause de cela, je ne m’arrêterai pas à dire que, mettant à part l’immoralité de l’esclavage, je n’ai élevé la voix qu’après m’être convaincu par moi-même de l’horrible misère des esclaves ; à cause de cela encore, on ne sera plus admis à écrire que, si j’avais mieux étudié les noirs, je n’aurais pas pris leur défense, ou que j’aurais bien vite dépouillé mon horreur d’Européen pour le nom d’esclave, « parce qu’il suffit d’un ou deux ans de séjour dans les colonies pour changer d’opinion ; et la meilleure preuve, c’est que ce sont les Européens qui deviennent les maîtres les plus durs et les plus sévères[1]. » C’est une preuve trop peu persuasive. Les Européens qui vont faire l’esclavage aux colonies, par la raison même qu’ils y vont, se montrent déjà tout corrompus. Ambitieux d’une fortune

  1. Des Noirs et de leur situation dans les colonies, par M. F. P.