Aller au contenu

Page:Schoonbroodt - L'autre Suzanne, 1916.djvu/33

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
29

intelligent que de me chercher une sotte querelle. Oh ! l’exécrable vieillard !

Mme de RYVÈRE. — Suzanne !… ton mari…

SUZANNE. — Laisse-moi dire. Tout cela, concentré en moi, me brise et me tue. J’ai besoin de crier à quelqu’un ma répulsion… de crier la honte qui me marque à l’épaule de sa fleur de lis… de crier parce que le cœur saigne… que la chair saigne aussi.

Mme de RYVÈRE. — Calme-toi, ou je n’en écoute pas davantage.

SUZANNE. — Je m’esseulai donc dans la serre et je me jetai sur un divan à l’ombre d’un beau palmier qui faisait une tache d’ombre brune sur l’or blond des allées. Je me mis aussitôt à rêver, à juger la situation. La tête renversée sur les coussins, je dus fermer les yeux tant les paupières étaient douloureuses. Il faisait une chaleur torride et les plantes tropicales dégageaient une chaleur si lourde… si lourde…

Mme de RYVÈRE. — Poétesse, va.

SUZANNE. — Oh ! non, pas de poème, mais une réalité froide, elle, comme la lame d’un poignard. Je m’assoupissais à peine quand soudain je sentis aux lèvres comme une brûlure horrible.