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Page:Schoonbroodt - Une petite bourgeoise, 1916.djvu/64

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Monsieur Dumortier arrive chez son fils, qui a installé un atelier dans les combles de la vieille maison. Là, malgré l’hiver et le vent qui souffle dans maintes lézardes, le jeune artiste travaille sans feu.

C’est l’atelier du peintre, avec ses draperies naïves, ses ébauches, fruits de longues rêveries, ses châssis sans cadre, ses caisses à sucre de Tirlemont qui servent de chaises et de tables.

Pour y atteindre, le bonhomme Dumortier doit traverser ses magasins où, sur les rayons poudreux, s’alignent les entonnoirs, les seaux, les bidons, les boîtes à chiques, ces multiples variétés du fer-blanc, démodées aujourd’hui. Il les considère un moment avec amour, puis il pousse un soupir douloureux et passe.

Il vient d’entrer chez Jean.

Il voudrait se montrer inflexible et solennel, mais il sent qu’il aura à lutter contre sa bonté naturelle. Du regard, il cherche son fils et l’aperçoit assis devant son chevalet, le pinceau levé.

Monsieur Dumortier. — Jean, j’ai à vous parler sérieusement. Pourquoi peins-tu encore ?

Jean. — Pourquoi je peins ? Mais, cher papa, je voudrais ne plus toucher à cette palette et c’est elle qui attire ma main. C’est devenu comme une nécessité pour moi de confier à la toile mes impressions…

Monsieur. — Tu as dû deviner pourtant notre situation de fortune. Elle est encore plus mauvaise que tu le crois. La barque est menacée par la