Page:Schopenhauer - Éthique, Droit et Politique, 1909, trad. Dietrich.djvu/177

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

de celle-ci. Dans la seconde disposition, par contre, la volonté prédomine, et la connaissance n’est là que pour éclairer les objets de la volonté et leurs voies. L’homme est grand, ou petit, selon que prédomine chez lui l’une ou l’autre manière d’envisager la vie.

Chacun tient le bout de son champ d’observation pour le bout du monde. Ceci est aussi inévitable dans le domaine intellectuel, qu’au point de vue physique l’illusion qu’à l’horizon le ciel touche la terre. Mais une des conséquences de ce fait, c’est que chacun de nous jauge avec sa mesure, qui le plus souvent n’est qu’une aune de tailleur, et que nous devons en passer par là ; comme aussi chacun nous prête sa petitesse, fiction qui est admise une fois pour toutes.

Il y a quelques idées qui existent très rarement d’une façon claire et déterminée dans une tête, et ne prolongent leur existence que par leur nom ; celui-ci n’indique en réalité que la place d’une telle idée, et, sans lui, elles se perdraient à tout jamais. L’idée de sagesse, par exemple, est de ce genre. Combien elle est vague dans presque toutes les têtes ! On peut se référer sur ce point aux explications des philosophes.

La « sagesse » me paraît indiquer non seulement la perfection théorique, mais aussi la perfection pratique. Je la définirais : la connaissance exacte et accomplie des choses, dans l’ensemble et en général, qui a si complètement pénétré l’homme, qu’elle se manifeste aussi dans sa conduite, dont elle est la règle en toute circonstance.