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la pensée de schopenhauer

Ce processus intellectuel entraîne avec lui dans les sciences la nécessité d’y établir beaucoup de points par déductions tirées de propositions antérieures, et ceci a donné naissance à l’antique erreur selon laquelle ce qui est prouvé serait seul complètement vrai, et selon laquelle toute vérité aurait besoin d’une preuve ; alors qu’au contraire chaque preuve a bien plutôt besoin d’une vérité non prouvée qui l’appuie ou qui appuie les preuves de cette preuve, une vérité directement établie étant préférable à une vérité établie par une preuve comme l’eau prise à sa source est préférable à l’eau prise à l’aqueduc. La perception, soit a priori, telle qu’elle est le fondement des mathémathiques, soit empirique et a posteriori, telle qu’elle est le fondement des autres sciences, est la source de toute vérité et la base de toutes les sciences.

Il n’existe pas de vérité qui se puisse établir uniquement et absolument par des raisonnements ; au contraire, la nécessité de l’établir par des raisonnements n’est jamais que relative, et même subjective. Or, comme toutes les preuves sont des raisonnements, il n’y a pas lieu, en présence d’une vérité nouvelle, de lui chercher tout d’abord une preuve, mais bien une