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la pensée de schopenhauer

avancé. Ce seront bien plutôt les grands progrès de la physique qui rendront eux-mêmes toujours plus sensible le besoin d’un métaphysique. D’une part, en effet, la connaissance toujours plus exacte, plus étendue et plus approfondie de la nature ne cesse de miner et finit par renverser les hypothèses métaphysiques en cours ; d’autre part, elle conduit à poser le problème métaphysique lui-même de façon plus claire, plus juste et plus complète, à l’isoler toujours plus nettement de tout ce qui n’est pas physique. En outre, c’est précisément de connaître toujours davantage et toujours mieux la nature des choses particulières, qui rend plus pressante une explication du sens général de l’ensemble, celui-ci apparaissant plus énigmatique dans la mesure même où on acquiert une connaissance empirique plus complète et plus approfondie de ses éléments. Evidemment, le brave savant spécialiste confiné dans sa branche des sciences physiques, ne se rend guère compte de tout cela. Il fait comme les prétendants dans la maison d’Ulysse : il bannit de son esprit la pensée de Pénélope et couche en toute satisfaction avec une servante de son choix. Nous voyons donc qu’on scrute aujourd’hui avec la plus extrême minutie l’écorce de la nature et qu’on connaît