Page:Schopenhauer - La Pensée, 1918, trad. Pierre Godet.djvu/132

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
90
la pensée de schopenhauer

ouvrage (sur le principe de raison), au temps de mon premier étonnement philosophique, le miracle ϰατ’ έξοχην.

Ce qu’on trouve, comme donnée immédiate, à la base de n’importe quelle conscience animale, fût-ce la plus imparfaite et la plus faible, c’est le sentiment d’un désir, et celui, très variable quant à ses degrés, de la satisfaction ou de la non-satisfaction de ce désir. Nous savons cela pour ainsi dire a priori. Car, aussi merveilleusement différentes que puissent être les unes des autres les innombrables espèces animales, aussi étrangère à toutes nos notions que puisse être dans son aspect telle ou telle forme nouvelle que nous apercevons pour la première fois, nous n’en considérons pas moins d’avance et avec certitude l’essence intime de tout animal comme une chose qui nous est bien con- nue, et même entièrement familière. Car nous savons que l’animal veut ; nous savons même ce qu’il veut : l’être, le bien-être, la vie et la propagation de cette vie. Nous le présumons identique à nous sur ce point avec une absolue certitude, et c’est pourquoi nous n’hésitons pas à lui attribuer telles quelles toutes les affections du Vouloir que nous discernons en nous-mêmes, et à parler de sa convoitise, de sa ré-