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la pensée de schopenhauer

de la sphère de connaissance où gisent les motifs de ces manifestations. Nous comprenons immédiatement, par l’analogie avec notre propre être, tous les actes et tous les gestes qui traduisent, chez les animaux, des mouvements du Vouloir ; c’est par là que nous pouvons sympathiser avec eux de mille manières. L’abîme qui subsiste par ailleurs entre eux et nous tient uniquement à la différence qui sépare notre intellect du leur.

Si on parcourt de haut en bas la série animale, on y voit l’intellect devenir toujours plus faible et plus imparfait ; mais on n’y constate aucune diminution correspondante du Vouloir. Au contraire, celui-ci conserve partout l’identité de sa nature, qui se manifeste toujours dans le même puissant attachement à la vie, le même souci de la conservation de l’individu et de l’espèce, le même égoïsme, la même absence d’égards envers les autres êtres, ainsi que dans les divers mouvements affectifs qui dérivent de ces tendances. Jusque dans le plus petit insecte le Vouloir est tout entier présent : l’insecte veut ce qu’il veut aussi intégralement et avec autant de décision que l’homme. La différence est uniquement dans la chose qu’il veut, c’est-à-dire dans les motifs, lesquels