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iii. de l’art

me de génie, au contraire, le phénomène universel, objectivement conçu, se dresse comme une chose qui lui est extérieure, comme un spectacle, qui expulse le Vouloir de la conscience. C’est ici que gît la différence entre l’aptitude aux grandes actions et l’aptitude aux grandes œuvres. Cette dernière exige de la faculté cognitive la profondeur et l’objectivité, lesquelles supposent elles-mêmes une séparation complète du Vouloir et de l’intellect ; l’autre a pour condition l’application de la connaissance à certaines fins, la présence d’esprit et la décision, ce qui implique un intellect perpétuellement soucieux des intérêts du Vouloir. Là où le lien entre les deux éléments est rompu, l’intellect, détourné de sa destination naturelle, négligera son service ; ainsi, il lui arrivera d’affirmer son émancipation jusque dans l’imminence d’un danger, de ne pouvoir, par exemple. s’empêcher de concevoir sous leur aspect pittoresque l’endroit et la situation où, dans le même temps, l’individu se trouve en péril. Au contraire l’intellect de l’homme raisonnable et avisé est toujours à son poste, toujours attentif aux circonstances et à leurs exigences ; dans chaque cas donné, l’homme ainsi