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la pensée de schopenhauer

au début de l’âge adulte que l’irritabilité et avec elle les fonctions de reproduction et de génération atteignent leur pleine force, pour l’emporter en général dès ce moment sur la fonction cérébrale. On s’explique ainsi que les enfants manifestent au total plus de goût et de disposition que les adultes pour toutes les occupations d’ordre théorique. C’est qu’en vertu de ce développement successif des parties de l’organisme ils sont doués de plus d’intellect que de Vouloir, c’est-à-dire que de penchants, d’appétits et de passions. Car intellect et cerveau ne font qu’un, exactement comme l’appareil génital — que j’ai pu appeler le foyer du Vouloir — ne fait qu’un avec la plus violente de toutes les convoitises. C’est parce que la funeste activité de cet appareil génital sommeille encore, alors que celle du cerveau est déjà pleinement éveillée, que l’enfance est le temps du bonheur et de l’innocence, le Paradis de la vie, l’Eden perdu, vers lequel nous regardons avec nostalgie durant tout le reste de notre existence. La vie de l’enfant est tout entière dans la connaissance bien plus que dans le Vouloir : là est le fondement de ce bonheur, auquel la nouveauté de tous les objets vient encore contribuer du dehors. C’est pour-