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la pensée de schopenhauer

tion germano-chrétienne de la femme ; enfin, ceux que l’on doit aux rêvasseries et aux radotages de l’amour hyperphysique et « clair-de-lune ».

Le grand poète sait se transformer de façon à se mettre complètement dans la peau de chacun des personnages qu’il veut représenter, et parler par la bouche de chacun d’eux comme un ventriloque. À tel moment il est le héros, et immédiatement après la jeune fille innocente, toujours avec une égale vérité et un égal naturel : ainsi font Shakespeare et Gœæthe. Le poète de second rang fait du personnage principal son porte-parole : ainsi Byron. Souvent alors les personnages secondaires demeurent sans vie, comme c’est également le cas du personnage principal chez le poète médiocre.

Il faut que le poète dramatique ou épique se dise qu’il est la destinée, et qu’il soit par conséquent impitoyable comme elle. Il est d’ailleurs aussi le miroir du genre humain ; il lui faut donc mettre en scène un grand nombre de caractères méchants, y compris quelques scélérats, ainsi que beaucoup de fous, de sots et de niais ; au milieu d’eux. par-ci par-là, un