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iv. de la vie et de la mort

l’imagine, mais bien au but véritable de son amour, à savoir l’être à engendrer, en qui il s’agit de maintenir le plus purement et le plus intégralement possible le type de l’espèce. Il arrive en effet nécessairement que toutes sortes de hasards physiques et de disgrâces morales entraînent autant de dégénérescences de la forme humaine ; et cependant le type authentique se trouve toujours rétabli à nouveau dans toutes ses parties ; cela grâce au sens de la beauté, qui domine et dirige partout l’instinct sexuel et sans lequel celui-ci se ravale au niveau d’un besoin répugnant. Ainsi chacun montrera tout d’abord dans ses désirs une préférence marquée pour les individus les plus beaux, c’est-à-dire ceux qui réalisent le type le plus pur de l’espèce ; chacun ensuite recherchera dans l’autre individu les avantages qui lui manquent, ou même trouvera belles les imperfections qui forment l’opposé et ainsi la compensation des siennes ; c’est pourquoi, par exemple, les petits hommes aiment les grandes femmes, les blonds les brunes, etc.

Mais l’homme est la dupe d’un mirage voluptueux, quand il s’imagine devoir goûter dans les bras de telle femme, dont la beauté l’attire, une félicité plus grande que dans les bras de toute autre, ou