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la pensée de schopenhauer

Admettre que l’homme est créé de rien conduit nécessairement à admettre que la mort est sa fin absolue. Sur ce point, l’Ancien Testament se montre parfaitement conséquent : car à une création ex nihilo ne peut correspondre aucune doctrine d’immortalité. Si le christianisme du Nouveau Testament possède une doctrine de ce genre, c’est qu’il est pénétré d’esprit indou.

Il est certain que l’éternité est une notion qui ne repose sur aucune représentation sensible ; aussi est-elle purement négative ; elle signifie simplement une existence indépendante du temps. Mais le temps, d’autre part, n’est lui-même que l’image de l’éternité : ό χρονος είϰων του αίωνος, comme a dit Plotin ; de même, notre existence dans le temps n’est que l’image de notre être en soi. Celui-ci doit être situé dans l’éternité, parce que précisément le temps n’est que notre forme de perception, qui seule fait que nous connaissons notre nature et la nature de toutes choses comme périssable, bornée, et vouée à l’anéantissement.

Si des considérations de ce genre sont propres à nous convaincre qu’il y a en nous quelque chose que la mort ne peut détruire, on voit que nous ne pou-