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la pensée de schopenhauer

bilité du caractère, d’aucuns la nieront en paroles, dont néanmoins toute la façon d’agir signifie implicitement qu’ils ne la mettent pas en doute. Ainsi, pourquoi n’hésitent-ils pas à refuser à jamais leur confiance à l’homme dont ils ont pu constater une seule fois la déloyauté, tandis qu’ils se fient au contraire à celui qui leur a donné antérieurement des preuves de sa bonne foi ? Là est d’ailleurs l’unique principe sur quoi se fonde la connaissance des hommes ; autrement celle-ci serait impossible, non moins que notre confiance dans les caractères que nous avons reconnus comme sûrs, dans les individus d’une honnêteté « éprouvée ». Aussi bien, même s’il arrive que cette confiance se trouve un jour déçue, ne disons-nous jamais d’une personne : « son caractère a changé » ; nous disons au contraire : « je m’étais trompé sur son compte ». {{Interligne} Le caractère de l’individu est inné. On ne le crée pas artificiellement, pas plus qu’il n’est dû au hasard des circonstances : il est l’œuvre de la nature même. Il se révèle déjà chez l’enfant, qui nous fait voir en petit tout ce que l’homme sera par la suite en plus grand. On s’explique ainsi que deux enfants élevés exactement dans le même milieu et selon les mêmes principes puissent néanmoins trahir des caractères