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Page:Schopenhauer - La Pensée, 1918, trad. Pierre Godet.djvu/329

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v. morale et religion

Cette différence n’aura rien changé à la tendance de sa volonté, encore moins à cette volonté elle-même. Sa conduite a beau revêtir, selon les circonstances et les moments, un aspect absolument différent ; son Vouloir est demeuré identique. Velle non discitur. (W. W. V. vol. I, § 55.)

La contrainte qu’exerce les motifs peut engendrer la légalité, mais non la moralité. On peut ainsi apprendre à l’égoïste qu’en renonçant à de petits avantages il en obtiendra de plus grands, à l’homme méchant qu’en faisant souffrir son prochain il s’attirera à lui-même de pires maux. Mais nul ne persuadera jamais à l’égoïste de renoncer à son égoïsme, au méchant de renoncer à sa méchanceté, pas plus qu’on ne pourrait persuader au chat de renoncer à son penchant pour la chasse aux souris. Même en ce qui concerne la bonté, on peut, en accroissant la perspicacité de l’homme bon, en l’instruisant des réalités de la vie, c’est-à-dire en éclairant son esprit, l’amener à manifester sa nature d’une façon plus complète et plus logique ; ainsi, par exemple, si on lui montre les conséquences lointaines que notre conduite entraîne pour autrui. En ce sens il y a sans contredit une culture morale et une éthique capable d’améliorer l’homme. Mais elle s’arrête là où je viens de dire ;