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la pensée de schopenhauer

il est aisé d’apercevoir ses limites. On fait la lumière dans le cerveau ; le cœur n’en devient pas meilleur. L’élément foncier, essentiel, décisif, dans l’être moral, comme dans l’être intellectuel et physique, c’est l’élément inné. Nos procédés et nos artifices n’y apportent jamais que des perfectionnements accessoires. Tout être est ce qu’il est en quelque sorte « par la grâce de Dieu », jure divino, θεια μοιρα.


Sur le fatalisme. Liberté et « primordialité ».

Le fatum, είμαρμενη, des Anciens, n’est rien d’autre que la certitude acquise par la conscience que tous les événements sont rigoureusement liés les uns aux autres par l’enchaînement causal ; que, par suite, ils s’accomplissent en vertu d’une nécessité absolue, et qu’ainsi l’avenir, entièrement arrêté, strictement déterminé par avance, ne saurait être plus que le passé modifié en quoi que ce soit. Il n’y a que la prévision de cet avenir qu’on puisse considérer dans les mythes fatalistes des Anciens comme un élément fabuleux ; encore faut-il faire ici abstraction de ce qu’il peut y avoir de plausible dans la clairvoyance magnétique et la seconde vue. Toujours est-il qu’au lieu de chercher à se débarrasser par de stériles ba-