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v. morale et religion

avait besoin que ces deux attributs, liberté et primordialité, demeurassent distincts — à admettre deux libertés : une liberté de la cause première, pour la cosmologie, et une liberté de la volonté humaine, pour la théologie et la morale.


Responsabilité et conscience morale.

Il y a une donnée de la conscience dont j’ai fait complètement abstraction jusqu’ici : je veux dire le sentiment parfaitement certain et distinct de responsabilité qui s’attache à tout ce que nous faisons, le sentiment qu’on est en droit de nous en demander compte, lequel sentiment tient à la certitude absolue que nous avons d’être nous-mêmes les auteurs de nos actions. C’est parce que nous en avons tous nettement conscience qu’aucun être humain, fût-il même profondément convaincu de la nécessité qui préside à l’accomplissement de nos actes, ne songera jamais à se prévaloir de cette nécessité pour s’excuser d’une mauvaise action et pour en rejeter la faute sur les motifs qui l’y ont déterminé, sous prétexte que, ces motifs intervenant, l’acte était désormais inévitable. L’auteur de cet acte, en effet, se rend fort bien compte que cette nécessité implique une condi-