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v. morale et religion

Il niera donc ce principe qu’il incarne en sa personne et dont son propre corps, à lui seul, est déjà l’expression ; c’est-à-dire que par toute sa conduite il infligera un démenti au phénomène de son être ; il le contredit désormais ouvertement.

Tout cela, dont je ne saurais donner qu’une faible idée en usant des termes généraux du langage abstrait, tout cela n’est point un conte philosophique forgé de toutes pièces, ni une invention d’aujourd’hui. C’est une vérité d’expérience ; c’est l’histoire très réelle de beaucoup de nobles âmes, c’est la vie — admirable et enviable — de beaucoup de ces saints qu’ont produits le christianisme et surtout le brahmanisme et le bouddhisme, ou d’autres religions encore. Quelque différents qu’aient pu être les dogmes dont leur raison avait subi l’empreinte, ce n’en est pas moins la même expérience intérieure, intuitive et directe, d’où procède toute vertu et toute sainteté, qui s’est exprimée par les mêmes traits dans la vie de chacun de ces hommes.

Sans doute est-ce pour la première fois qu’on analyse et qu’on définit, comme je le fais ici, sous forme abstraite et dépouillée d’éléments mythiques, l’essence profonde de tout ce qu’on ap-