Page:Schopenhauer - La Pensée, 1918, trad. Pierre Godet.djvu/397

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
355
v. morale et religion

de son organisation et contrairement à tous ses instincts, l’idée absurde d’une cause du monde individuelle et personnelle, celle d’un commencement absolu de l’Univers, et d’autres notions du même genre. Par là on obstrue à jamais les horizons illimités de l’esprit et les perspectives qui s’ouvraient à lui sur le monde infini des êtres ; on lui interdit tout accès au domaine de la libre recherche ; on l’atrophie et on le paralyse dans ses dispositions naturelles, à seule fin de le mettre en état de s’assimiler des idées fausses.


Sur Dieu.

Au cours des siècles, tout particulièrement dans la période scolastique et celle qui a suivi, on a peu à peu revêtu Dieu de toutes sortes d’attributs. Plus tard, avec le progrès des lumières, on s’est vu obligé de l’en dépouiller de nouveau pièce à pièce ; et l’on ne demanderait pas mieux aujourd’hui que de le dévêtir complètement, si l’on n’était arrêté par la crainte de ne rien trouver sous les habits. Il y a en tous cas deux pièces de vêtement qu’on ne saurait lui retirer ; je veux dire qu’il y a deux attributs inséparables de l’idée divine : ce sont la personnalité et la causalité. L’une et l’autre sont nécessairement toujours impliquées dans la notion de Dieu, comme