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la pensée de schopenhauer

de ne tenir aucun compte de leurs idées et de leurs goûts, de leurs éloges ou de leur blâme. D’ailleurs c’est là une condition qui se réalise d’elle-même sitôt que les autres se trouvent réunies. Et il est bien heureux qu’il en soit ainsi ; car si l’auteur d’une œuvre forte et grande voulait prendre en considération l’opinion publique ou le jugement des hommes de sa partie, il serait entraîné à chaque pas hors de sa vraie voie. Quiconque prétend à l’immortalité doit donc se soustraire à l’influence de son époque, ce qui exige naturellement qu’il renonce aussi à toute influence sur son époque, et qu’il n’hésite pas à acheter la gloire des siècles au prix de la faveur des contemporains.


Sur l’honneur.

La notion de l’honneur est beaucoup moins aisée à analyser et exige plus de commentaires que celle du rang. Il conviendrait avant tout de la définir. Dirons-nous, par exemple, que l’honneur est notre conscience extérieure, comme la conscience est notre honneur intérieur ? Ce serait là une définition séduisante, peut-être, pour certains esprits, mais plus brillante que précise et solide. Il vaut mieux