de ne tenir aucun compte de leurs idées et de leurs goûts, de leurs éloges ou de leur blâme. D’ailleurs c’est là une condition qui se réalise d’elle-même sitôt que les autres se trouvent réunies. Et il est bien heureux qu’il en soit ainsi ; car si l’auteur d’une œuvre forte et grande voulait prendre en considération l’opinion publique ou le jugement des hommes de sa partie, il serait entraîné à chaque pas hors de sa vraie voie. Quiconque prétend à l’immortalité doit donc se soustraire à l’influence de son époque, ce qui exige naturellement qu’il renonce aussi à toute influence sur son époque, et qu’il n’hésite pas à acheter la gloire des siècles au prix de la faveur des contemporains.
La notion de l’honneur est beaucoup moins aisée à analyser et exige plus de commentaires que celle du rang. Il conviendrait avant tout de la définir. Dirons-nous, par exemple, que l’honneur est notre conscience extérieure, comme la conscience est notre honneur intérieur ? Ce serait là une définition séduisante, peut-être, pour certains esprits, mais plus brillante que précise et solide. Il vaut mieux