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Page:Schopenhauer - La Pensée, 1918, trad. Pierre Godet.djvu/42

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la pensée de schopenhauer

Iconoclasm in German philosophy, un autre de Saint-René Taillandier dans la Revue des Deux-Mondes (août 1856) révélaient le nom de Schopenhauer aux Anglais et aux Français. C’est aussi le moment où se répand sa réputation d’original et de causeur incisif, qui attire à la table de l’Hôtel d’Angleterre les étrangers curieux de le voir et de l’entendre. Des peintres et des sculpteurs sollicitent tour à tour l’honneur de faire son portrait. Cette aube de la gloire éclaira d’un sourire la vieillesse du philosophe. Justifiant l’inébranlable confiance qu’il avait gardée durant trente ans d’obscurité dans le jugement de l’avenir et dans la valeur impérissable de son œuvre, elle adoucissait l’amertume qu’il n’avait pu, malgré tout, s’empêcher de ressentir et de manifester. Son « Vouloir-vivre », qu’il ne se dissimulait point à lui-même, en éprouva comme un regain de jeunesse. Ilse croyait taillé pour vivre cent ans. Il n’en fut pas moins emporté, sans grandes souffrances, par une pneumonie, le 21 septembre 1860, à soixante-douze ans. Par son testament, où il assurait l’avenir de sa servante sans oublier celui de son chien, laissant à ses disciples ses manuscrits et sa bibliothèque, il instituait pour légataire universelle l’Association berlinoise des anciens défenseurs de l’ordre qui avaient réprimé l’émeute en 1848. Son tombeau. qu’on voit au cimetière de Francfort, est fait sur sa recommandation expresse d’une simple dalle portant ces seuls mots, sans une date, « sans une syllabe de plus » : arthur schopenhauer.