Page:Schopenhauer - La Pensée, 1918, trad. Pierre Godet.djvu/71

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
29
i. de la connaissance

chercher de cause ; car il n’y a aucune raison a priori qui permette de conclure de l’existence des choses données, c’est-à-dire des états de la matière, à leur non-existence antérieure, et de celle-ci à leur apparition, c’est-à-dire à un changement. Ainsi la simple existence d’une chose n’autorise pas à conclure qu’elle ait une cause. Il peut cependant y avoir des raisons a posteriori, tirées de l’expérience passée, qui permettent de supposer qu’un état donné n’a pas toujours été tel, mais qu’il a pris naissance par suite d’un autre, donc par un changement ; de ce changement il y a lieu dès lors de chercher la cause, puis la cause de cette cause, et nous voilà dès lors engagés dans cette marche rétrograde à l’infini où vous induit toujours l’application de la loi de causalité.

J’ai dit plus haut : « les choses, c’est-à-dire les états de la matière » ; car le changement et la causalité ne concernent que des états. Ce sont ces états qu’on comprend sous le nom de forme, au sens large du terme. Or seules les formes changent ; la matière persiste. Seule donc aussi la forme est soumise à la loi de causalité. C’est en donnant un sens trop large à la notion abstraite de cette causalité, qu’on en vint à éten-